Analyse
L'international des feux Loto-Québec
Retour sur la soirée et analyse du feu 2025 de l'Italie par la firme PyroItaly







Frédérick Bastien
Collaborateur
3 Juillet 2025 - LaRonde
Mon excitation pour ce premier feu de la firme PyroItaly à Montréal a augmenté de quelques crans lorsque j’ai appris, à la suite de l’entrevue effectuée par mtlPYROmedia, que le concepteur Federico Tibaldi avait joué un rôle actif au sein de l’équipe de PyroEmotions & PyroDigit, récipiendaire du Jupiter d’or en 2013. Ce jeudi soir, le bracelet mauve qu’il arborait à son poignet et qu’il avait porté il y a 12 ans n’était que l’un des rappels de ce Succès de juke-box absolument mémorable.
Sous le titre Les paroles de la vie, que l’on aurait plus fidèlement traduit de l’anglais par Les lettres de la vie, le spectacle ambitionnait de combiner deux trames narratives : il évoquait (1) les périodes du cycle de vie à travers une sélection de 12 chansons et de courtes lettres dont la rédaction devait aussi témoigner de (2) l’évolution des techniques d’écriture. Par le bruit du crayon couchant sur une feuille de papier les paroles introductives de Firedancer, la table était mise. Par la suite, quatre brefs passages narratifs en français (avec une voix féminine qui semblait être la même que celle du Juke Box en 2013) : le premier au son de la dactylo, le deuxième à travers les bruits caractéristiques d’un échange de textos. Pour les deux autres, on entendit des battements de cœur et le tic-tac de l’horloge, deux sons qui s’harmonisaient bien aux thèmes de l’amour et du temps présent qui passe très rapidement, mais qui ont rompu avec l’évolution des techniques d’écriture. Cela dit, le concepteur du feu a eu la bonne idée de profiter de ces quatre segments narratifs pour insérer une bonne partie des quatre portions obligatoires de lasers.
L’arsenal déployé par PyroItaly se distinguait par des couleurs brillantes, des formes bien définies et des séquences claires, par exemple avec les changements chromatiques. Dans l’avant-dernier tableau, sur Beautiful Day, divers schémas aux couleurs de l’arc-en-ciel mettaient bien en évidence cette richesse de couleurs. Toutefois, j’ai été surpris de ne voir aucune bombe multi-bris dans ce spectacle italien. La qualité des pièces pyrotechniques était élevée, mais il est probable que d’autres concurrents devancent l’équipe italienne sur ce critère avec des produits plus sophistiqués encore (en commençant par les Japonais, redoutables sur ce point).
La synchronisation de ces pièces pyrotechniques avec la bande sonore était remarquable tout au long du spectacle, sans paraître trop mécanique. Les effets pyrotechniques étaient synchronisés sur la note dans les passages où cela comptait le plus, l’une des séquences les plus spectaculaires étant les deux barrages successifs de flashs blancs extrêmement forts, survenus vers la fin du tableau final, sur une double percussion d’It’s my life. Les vidéos qui circulent sur les médias sociaux ne rendent pas justice à la puissance ainsi provoquée et qui fit réagir le public.
Au point de vue de la conception technique, ce tableau final ne pouvait provoquer un contraste plus important avec celui du feu d’ouverture présenté une semaine plus tôt. Près de la mi-temps du spectacle, le tableau sur la musique d’El tango de Roxanne était lui-même aussi puissant que bien des finales et constituait un prélude prometteur à l’apothéose qui allait survenir une quinzaine de minutes plus tard. La 3e rampe a été grandement mise à contribution, appuyée à quelques occasions par la 5e située au centre du lac, plus près du public. Les schémas de tir ont cependant pu sembler un peu répétitifs. D’ailleurs, l’assemblage circulaire de pièces placées à divers angles sur la 4e rampe, sur le toit de la salle technique, ne m’a pas semblé produire un effet optimal.
Enfin, la conception pyromusicale était très bonne. Le rythme de la bande musicale et celui du spectacle pyrotechnique étaient parfaitement harmonisés. Cela dit, quelques choix ont été un peu curieux. Par exemple, c’est sur la chanson Tattoo de Loreen qu’il y eut une insistance sur les couleurs du drapeau italien, alors que ni la chanson, ni l’artiste n’ont de lien évident avec l’Italie. L’emploi des couleurs nationales aurait été plus judicieux pendant l’un des autres segments plus directement liés au pays.
Dans l’un des segments narratifs du spectacle, on déclara que « les amours d’été […] ont généralement un élément en commun : ils sont des étoiles filantes, un moment de splendeur dans le ciel, un éclair fugace d’éternité qui disparaît en un instant ». On pourrait dire la même chose d’un feu d’artifice. Mais pour ses artisans, un prix Jupiter peut aider à prolonger cet instant. Il est probable que ce soit le cas ici.